Cette étude avait comme objectifs de faire le point sur les évolutions climatiques des Hautes Terres de Madagascar et leurs impacts sur les systèmes de production, et de déterminer quelles sont les pratiques de l’agriculture climatointelligente (ACI) les plus intéressantes et facile à vulgariser. Le travail confronte les perceptions des évolutions climatiques de différents acteurs du développement et du monde paysan, et de leurs impacts, à une analyse des données climatiques du Vakinankaratra sur la période 1960-2019. Il se poursuit par l’analyse des commentaires de ces acteurs, et de documents, concernant de nombreuses pratiques.On constate une hausse importante des températures (+2,4°C depuis 1960), avec une diminution des nuits froides, une quasi-disparition du gel, et une augmentation des journées chaudes, sans températures vraiment élevées (> 35°C). Cela confirme les dires des acteurs et explique les mauvaises floraisons des pommiers. La pluviométrie montre une diminution de 30% (-450 mm) depuis 1960, plus forte qu’ailleurs à Madagascar, mais reste élevée (1100-1300 mm). Cela explique la baisse des ressources hydriques hivernales qui affecte les irrigations de contresaison (pommes de terre, maraichage) et retarde la préparation des rizières. Les analyses indiquent une dégradation des conditions hydriques au début de la saison des pluies, en accord avec les difficultés rapportées d’installation des cultures pluviales (maïs, pomme de terre, riz, etc.). Contrairement aux ressentis il n’y a pas de modification concernant les grosses pluies ou les pauses.Les acteurs se plaignent d’une augmentation des problèmes phytosanitaires, dont la chenille légionnaire (Spodoptera frugiperda) sur maïs, le flétrissement bactérien (Ralstonia solanearum) et le mildiou (Phytophtora infestans) sur la pomme de terre, et les « fangalabola » (Deborea malagassa) sur les pommiers, problèmes qui ne pourront qu’être accentués par l’intensification et les évolutions climatiques. Ils rapportent aussi une baisse de la fertilité des sols, en lien avec l’exploitation de plus en plus intensive et continue (monoculture de maïs) et les faibles apports de matière organique. L’utilisation de variétés adaptées devraient permettre de répondre à de nombreux problèmes (augmentation des températures, petits aléas hydriques, certaines maladies), et des efforts de reboisement et d’aménagement des bassins versants (haies vives, embocagements, canaux d’infiltration) atténueront la diminution des ressources hivernales. La baisse de la fertilité des sols impose de se tourner vers des pratiques agroécologiques avec apport dans les sols de plus de matière organique, qui seules permettront des productions durables et une meilleure résistance aux aléas hydriques et aux bioagresseurs. Parmi les pratiques à recommander on peut citer les rotations et associations céréales-légumineuse, déjà connues mais que l’on peut améliorer, l’intégration agriculture-élevage (production fourragère par Pennisetum purpureum et Brachiaria, fumier amélioré), les composts, les plantes répulsives (desmodium, mucuna, crotalaire), systèmes pushpull (desmodium-pennisetum) et biopesticides naturels (« adigasy ») à base de nombreuses plantes, les haies vives et embocagements multi-spécifiques, les canaux d’infiltration et les reboisements.