À Madagascar, les initiatives agroécologiques se sont multipliées depuis quelques années. Une étude menée par le Cirad auprès des exploitations agricoles familiales met en évidence les freins politiques et pratiques à leur succès et au développement d’une réelle transformation des systèmes agricoles et alimentaires à l’échelle de l’île.
The study of the metabolism of these two fokontanys revealed the intensity of biomass uses
through all their forms, as well as the diversity of strategies at farm and territory scale. Indeed,
all produced biomass finds a use in household consumption, market sales, livestock production,
energy consumption or fertility management. This participates greatly to the autonomy of the
territory. But it may also lead to competition in uses, and unbalances at territory scale, since a
lot of biomass is exported as cash crops or animal products.
➢ Two territories with different issues regarding autonomy
Malaza is market oriented. Miarinarivo is subsistence oriented, with developing market
opportunities. Despite their geographical proximity and their similarities in the general structure
of flows, they present two different types of metabolism. Malaza is a very productive territory,
and the market opportunities are making it more and more intensive. The pressure over all types
of land is high, and even though crop-livestock integration enhances circularity within the
fokontany, the input/output balance seems unbalanced. Miarinarivo is also very productive, but
much less intensive. The external markets do not represent as great a pressure on the territory,
allowing the households to produce for themselves before thinking of selling outside. The
fokontany’s biomass flows are organised upon a strong autonomy, in which livestock plays a
preponderant part.
Further works including conversion of biomass flows to substance flows (N, P) should allow to
reconsider these questions with a more precise vision of the flows and especially the
calculations of indicators of circularity, autonomy and sustainability.
➢ Multiple potential drivers of flows
The question of the governance of the flows must be answered to place the metabolism
diagrams in the frame of territorial ecology. The results obtained through this preliminary work
provide a few hints regarding the major drivers of the flows:
• The main land uses and resource accessibility. It was one of the main hypotheses in this
work, and was verified: the different land uses lead to various accessibility to biomasses,
therefore different flows within the fokontanys and within the households.
IMPACTS DU CHANGEMENT
CLIMATIQUE SUR
CERTAINES CHAÎNES
DE VALEUR DES
HAUTES TERRES ET
PROPOSITIONS DE
MESURES D’ADAPTATION :
CE QUE LA SCIENCE ET LES
EXPÉRIENCES PRÉCÉDENTES
NOUS ENSEIGNENT
Cette étude avait comme objectifs de faire le point sur les évolutions climatiques des Hautes Terres de Madagascar et leurs impacts sur les systèmes de production, et de déterminer quelles sont les pratiques de l’agriculture climatointelligente (ACI) les plus intéressantes et facile à vulgariser. Le travail confronte les perceptions des évolutions climatiques de différents acteurs du développement et du monde paysan, et de leurs
impacts, à une analyse des données climatiques du Vakinankaratra sur la période 1960-2019. Il se poursuit par l’analyse des commentaires de ces acteurs, et de documents, concernant de nombreuses pratiques.On constate une hausse importante des températures (+2,4°C depuis 1960), avec une diminution des nuits froides, une quasi-disparition du gel, et une augmentation des journées chaudes, sans températures vraiment élevées (> 35°C). Cela confirme les dires des acteurs et
explique les mauvaises floraisons des pommiers.
La pluviométrie montre une diminution de 30% (-450 mm) depuis 1960, plus forte qu’ailleurs à Madagascar, mais reste élevée (1100-1300 mm).
Cela explique la baisse des ressources hydriques hivernales qui affecte les irrigations de contresaison (pommes de terre, maraichage) et retarde la préparation des rizières. Les analyses indiquent une dégradation des conditions hydriques au
début de la saison des pluies, en accord avec les difficultés rapportées d’installation des cultures pluviales (maïs, pomme de terre, riz,
etc.). Contrairement aux ressentis il n’y a pas de modification concernant les grosses pluies ou les pauses.Les acteurs se plaignent d’une augmentation des problèmes phytosanitaires, dont la chenille légionnaire (Spodoptera frugiperda) sur maïs, le
flétrissement bactérien (Ralstonia solanearum) et le mildiou (Phytophtora infestans) sur la pomme de terre, et les « fangalabola » (Deborea malagassa) sur les pommiers, problèmes qui ne pourront qu’être accentués par l’intensification et les évolutions climatiques. Ils rapportent aussi une baisse de la fertilité des sols, en lien avec
l’exploitation de plus en plus intensive et continue (monoculture de maïs) et les faibles apports de matière organique. L’utilisation de variétés adaptées devraient permettre de répondre à de nombreux problèmes (augmentation des températures, petits aléas
hydriques, certaines maladies), et des efforts de reboisement et d’aménagement des bassins versants (haies vives, embocagements, canaux
d’infiltration) atténueront la diminution des ressources hivernales.
La baisse de la fertilité des sols impose de se tourner vers des pratiques agroécologiques avec apport dans les sols de plus de matière organique, qui seules permettront des productions durables et une meilleure résistance aux aléas hydriques et aux bioagresseurs. Parmi les pratiques à recommander on peut citer les rotations et
associations céréales-légumineuse, déjà connues mais que l’on peut améliorer, l’intégration agriculture-élevage (production fourragère par Pennisetum purpureum et Brachiaria, fumier amélioré), les composts, les plantes répulsives
(desmodium, mucuna, crotalaire), systèmes pushpull (desmodium-pennisetum) et biopesticides naturels (« adigasy ») à base de nombreuses plantes, les haies vives et embocagements multi-spécifiques, les canaux d’infiltration et les reboisements.
Compte rendu de l’Atelier de prospective « 3 horizons »,
co-construire une vision stratégique pour accompagner le
développement de l’agroécologie en région Vakinankaratra
L’agroécologie émerge depuis quelque dizaine d’années comme un modèle de production agricole
d’intérêt, bien que parfois controversé, conciliant durabilité, agriculture familiale et contractuelle. L’atelier
a visé à mobiliser une démarche originale de prospective, dans laquelle une diversité d’acteurs agissant
dans la région Vakinankaratra se sont réunis afin de construire une vision partagée de l’agriculture
agroécologique et un plan d’action permettant d’y parvenir. Cette démarche se distingue des autres
démarches par le fait qu’elle consiste à identifier les ruptures possibles ou les transformations de
tendances, qui deviendront peut-être les tendances fortes du futur. L’enjeu majeur est donc de permettre
aux acteurs régionaux de prendre conscience, de se préparer et d’anticiper ces changements. Cet atelier
a consisté à imaginer collectivement l’agriculture du futur en région Vakinankaratra, la place de
l’agroécologie, les possibles tensions à anticiper et des moyens pour accompagner ces évolutions. Une
équipe de chercheurs du CIRAD, du GSDM et du FOFIFA ont animé cet atelier, partagé en temps de
discussion en plénière et par groupe.
Dans le renouvellement et le dépassement des débats sur les conceptions de l’agroécologie et sur la nature des transitions à favoriser, l’exemple des Hautes Terres
malgaches apporte un éclairage sur l’importance du point de départ des agricultures
pour penser les évolutions. La trajectoire des agricultures traditionnelles, majoritaires
à Madagascar, mais aussi en Afrique subsaharienne, est celle de l’intensification
agro-écologique. C’est aussi, finalement, la poursuite de cette intensification agroécologique, différente de l’agro-écologie des pratiques ou de l’agro-écologie intégrale
qui sont pensées en réaction à l’intensification conventionnelle, qui apparaît la plus
adaptée aux ressources et à la vulnérabilité de ces exploitations.
Pour que cette intensification agro-écologique se concrétise, il est nécessaire de prendre
en compte les contextes démographiques et économiques, les dotations en facteurs de
production, la disponibilité et l’accessibilité aux ressources naturelles. Il faut partir des
pratiques et savoir-faire existants, qui peuvent être pour la plupart des cas en Afrique
subsaharienne considérés comme agro-écologiques. Mais ces savoirs et pratiques se
combinent en des systèmes d’activités à la fois complexes et plus « sophistiqués » que les
«paquets d’innovations technologiques » proposés par la recherche agronomique. Il faut
aussi évaluer et comprendre les marges de manœuvre effectives des systèmes concernés,
pour éviter de promouvoir des réponses techniquement souhaitables et cohérentes
dans une perspective sectorielle ou de spécialisation agricole, mais simplement inapplicables ou inaccessibles. Par ailleurs, au vu de la diversité des situations, une approche
s’adaptant aux diversités territoriales est nécessaire. Une « intensification par la diversification» impose mais en même temps valorise la mobilisation des différents acteurs et
le renforcement des capacités d’innovation pour gérer une plus grande complexité. Elle
déplace la réflexion agro-écologique de la parcelle ou de l’exploitation vers les systèmes
alimentaires et les territoires dans lesquels évoluent les agriculteurs.
Pour accompagner ces dynamiques, il convient donc de renouveler les politiques agricoles et alimentaires à l’échelle des territoires en identifiant puis en valorisant les
ressources spécifiques de ces derniers. Au regard de l’intensification agro-écologique,
il s’agit de définir des stratégies agricoles et alimentaires qui s’appuient sur ces
ressources territoriales. Cela concerne bien sûr les stratégies de marché, avec notamment l’identification et la valorisation de marques de qualité, mais le raisonnement
peut être étendu aussi à la gestion des systèmes alimentaires adaptée aux réalités
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Les moteurs du développement de l’agro-écologie en Afrique subsaharienne
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locales : répartition de la valeur, meilleure articulation de l’industrie agroalimentaire
avec l’organisation locale des marchés, redistribution permettant l’investissement en
biens publics, mise en cohérence avec les opportunités et pratiques de diversification
agricole et extra-agricole, etc.
L’exemple des Hautes Terres malgaches montre enfin que les solutions techniques
seules ne seront pas des leviers suffisants pour améliorer significativement et durablement les conditions de vie et la qualité des systèmes agro-alimentaires. Les blocages
sont tels que l’on peut difficilement imaginer d’évolution positive sans une action
publique massive et coordonnée, à l’échelle des exploitations mais aussi des filières et
des territoires9. Il importe de produire des connaissances pour évaluer les différentes
options — agro-écologie des pratiques, agro-écologie intégrale ou intensification
agro-écologique. Il importe surtout selon nous de définir les stratégies susceptibles de
lever les contraintes, et d’estimer les moyens à mettre en œuvre pour concrétiser les
opportunités offertes par l’intensification agro-écologique, option que nous jugeons
aujourd’hui la plus crédible dans le Vakinankaratra, mais aussi pour la majorité des
agricultures familiales de l’Afrique subsaharienne.
Plus largement, et quelle que soit l’option choisie, il est aussi nécessaire de mieux
documenter les performances économiques et sociales de ces différentes formes
d’agro-écologie au niveau des systèmes d’activités des exploitations agricoles familiales
comme à celui des systèmes alimentaires. Il semble que c’est en effet dans un changement radical des rapports de force prévalant à la construction des prix, y compris en
permettant de rémunérer les services aujourd’hui non marchands de l’agriculture et
de ses filières (dits services écosystémiques), que les systèmes agricoles et les systèmes
alimentaires pourront, dans ces conditions défavorables, entamer une intensification
agro-écologique dans les situations aujourd’hui bloquées en Afrique subsaharienne.
La diffusion des pratiques agroécologiques telles que l’agroforesterie, la foresterie paysanne, la
fabrication de compost et le système de riziculture intensif (SRI) vise à améliorer le revenu des
exploitations agricoles par l’augmentation et la diversification des produits agricoles et par la gestion
durable des ressources naturelles. Cette thèse se propose d’évaluer l’impact de l’adoption de ces
pratiques agroécologiques sur (1) l’empreinte carbone des exploitations agricoles et (2) le stockage de
carbone dans le sol.
Un échantillonnage de 200 exploitations agricoles représentatives de la région Itasy a été sélectionné
pour l’étude. Des enquêtes ont été réalisées pour collecter les données permettant de caractériser
chaque exploitation (taille, surface, types de culture et intrants agricoles, élevage, consommation
d’énergie). Les flux de biomasses et de matières au sein de chaque exploitation ont été représentés via
les cartes des flux de ressource. L’empreinte carbone de chaque exploitation a été calculée à partir
d’un outil élaboré dans le cadre de cette thèse appelé: TropiC Farm Tool. Cet outil, développé sur
Microsoft Excel intègre tous les facteurs d’émission et de stockage de gaz à effet de serre (GES)
adapté au contexte de l’Itasy. Pour l’étude des stocks de carbone du sol, 700 parcelles de culture ont
été inventoriées et ont fait l’objet de prélèvement d’échantillons de sol sur une profondeur de 30 cm.
La technique de la spectrométrie en moyen infrarouge (SMIR) a été utilisée pour déterminer les stocks
de carbone du sol.
L’empreinte carbone des exploitations agricoles étudiées a été estimée en moyenne à 0,8 ±5,5
tCO2eq.ha-1 si rapportée en unité de surface et 0,08 ±2.4 tCO2eq.t-1 si rapporté en unité de
production agricole. L’intégration des pratiques agroécologiques à l’échelle de la ferme a permis de
réduire l’empreinte carbone des exploitations agricoles jusqu’à 364% grâce à la séquestration de GES
via les puits de carbone comme la biomasse ligneuse et le sol.
L’application de la SMIR a permis d’élaborer des modèles performants et robustes pour la
détermination du carbone organique du sol pour chaque type de sol dominant de la Région Itasy à
savoir les sols ferrallitiques (R2=0,9 et RPD=3,15) et les sols volcaniques (R2=0,95 et RPD=4,31).
L’étude a montré que le type de sol est un fort déterminant à l’origine de la grande variabilité spatiale
du stock de carbone du sol de la Région Itasy. Les sols volcaniques ont montré un stock de carbone
moyen de 125 ± 22 MgC.ha-1 tandis que les sols ferrallitiques ont affiché une valeur moyenne des
stocks de 74 ± 46 MgC.ha-1. Sur un même type de sol, il a été observé que l’adoption des pratiques
agroécologiques induit une tendance positive au stockage de carbone par l’apport de matière organique
au sol. Néanmoins, il a été proposé comme perspective d’étude de travailler sur des parcelles
paysannes contrôlées et sur des systèmes de plus longue durée pour pouvoir approfondir les effets de
chaque pratique agroécologique sur le stockage de carbone dans le sol.
Cette étude a ainsi permis de montrer que l’intégration des pratiques agroécologiques à l’échelle de la
ferme offre des bénéfices environnementaux à la fois (i) en termes de réduction des émissions de GES
via les techniques de gestion des effluents d’élevage et de gestion de l’eau sur les systèmes de
riziculture inondée et (ii) en termes de séquestration de carbone dans la biomasse ligneuse par la
plantation d’arbres et dans le sol par l’apport de matières organiques
Pillars and challenges of a three-scale approach for designing innovative agroecological cropping systems – Case-study of the Diagnosis, Assessment, Training and Extension (DATE) approach
Introduction:
Shifting from conventional to agroecological based cropping systems faces differerent issues, mostly methodological and technical (Steiner, 1985, Malézieux et al., 2009). This paper aims to present the Diagnosis, Assessment, Training and Extension (DATE) approach used in different tropical contexts aiming to scale-out innovative and locally adapted farming systems. This approach has been used in in different tropical countries under small farming contetxs e.g. Madagascar, Laos, Cameroon, to design innovative cropping systems based on Conservation Agriculture principles (Séguy et al., 2006). The pillars and the challenges of this DATE approach are to work simultaneously at three scales i.e. field, farm, territory integrating two main concepts of cropping system designing, the de-novo and the step-by-step approaches (Meynard et al., 2012).
High altitude upland rice production systems are expected to benefit from climate change
induced increase in temperatures. The potential yield of rice genotypes is governed by the thermal
environment experienced during crop development phases when yield components are determined.
Thus, knowledge on genotypic variability in phenotypic responses to variable temperature is required
for assessing the adaptability of rice production to changing climate. Although, several crop models are
available for this task, genotypic thermal constants used to simulate crop phenology vary strongly
among the models and are under debate. Therefore, we conducted field trials with ten contrasting
upland rice genotypes on three locations along an altitudinal gradient with five monthly staggered
sowing dates for two years in Madagascar with the aim to study phenological responses at different
temperature regimes. We found that, crop duration is equally influenced by genotype selection, sowing
date and year in the high altitude. In contrast, in mid altitudes genotype has no effect on crop duration
but year and sowing date strongly affect crop duration. At low altitudes crop duration is more affected
by sowing date and less by genotype and year. Every 1°C increment in mean air temperature decreases
crop duration (germination to flowering) by 5 to 9 days depending on genotype. Using a wide range of
environments for estimating thermal constants (Tbase and Tsum) allowed for more accurate results
under field conditions. Whereas the mid altitudes represent favorable conditions for upland rice, grain
yield is strongly affected by low temperatures at high altitudes and severly influenced by frequent
tropical cyclones at low altitudes. In high altitude, genotype explained 68% of variation in spikelet
sterility, whereas in mid and low altitudes environment explained more than 70% of the variation. The
phenological responses determining crop duration and yield, the reported basic genotypic thermal
constants, and the analyses of genotypic thermal responses with regard to spikelet sterility reported
here, provide valuable information for the improvement of rice phenological and growth models
urgently needed to develop new genotypes and better adapted cropping calendars.
Les pratiques agroécologiques de l'Agriculture de Conservation permettent une augmentation et une stabilisation des rendements dans un contexte de faible utilisation d'intrants dans les pays du Sud. Elles répondent, notamment à Madagascar, à des enjeux de développement rural, de protection de l'environnement et d'adaptation au changement climatique. Ces pratiques constituent une alternative crédible aux approches de la révolution verte qui ont montré leurs limites. Aujourd'hui , une multiture d'arguments scientifiques, d'expériences de terrain et de leçons apprises auprès de projets de développement rural et d'exploitations agricoles familiales démontrent le potentiel de l'agroécologie pour assurer, dans le cadre d'approches holistiques et suivant un certain nombre de condition, la sécurité alimentaire des pays, la préservation des ressources naturelles et l'adaptation au changement climatique.