Depuis les années 1980, le Cirad (Centre de Coopération Internationale de Recherche en Agronomie pour le Développement) et le FOFIFA (Centre National de Recherche Appliqué au Développement Rural) conduisent ensemble un programme de sélection variétale du riz pluvial pour les Hautes Terres et le Moyen Ouest de Madagascar. Chaque année, plusieurs croisements et lignées avancées sont testées en station (à Andranomanelatra pour les Hautes Terres ou à Ivory pour le Moyen Ouest), ainsi que sur les terrains de production avec la participation des agriculteurs intéressés.
L’objectif de ce rapport est de résumer toutes les activités réalisées pour le programme
pendant la campagne agricole 2021-2022.
IMPACTS DU CHANGEMENT
CLIMATIQUE SUR
CERTAINES CHAÎNES
DE VALEUR DES
HAUTES TERRES ET
PROPOSITIONS DE
MESURES D’ADAPTATION :
CE QUE LA SCIENCE ET LES
EXPÉRIENCES PRÉCÉDENTES
NOUS ENSEIGNENT
Cette étude avait comme objectifs de faire le point sur les évolutions climatiques des Hautes Terres de Madagascar et leurs impacts sur les systèmes de production, et de déterminer quelles sont les pratiques de l’agriculture climatointelligente (ACI) les plus intéressantes et facile à vulgariser. Le travail confronte les perceptions des évolutions climatiques de différents acteurs du développement et du monde paysan, et de leurs
impacts, à une analyse des données climatiques du Vakinankaratra sur la période 1960-2019. Il se poursuit par l’analyse des commentaires de ces acteurs, et de documents, concernant de nombreuses pratiques.On constate une hausse importante des températures (+2,4°C depuis 1960), avec une diminution des nuits froides, une quasi-disparition du gel, et une augmentation des journées chaudes, sans températures vraiment élevées (> 35°C). Cela confirme les dires des acteurs et
explique les mauvaises floraisons des pommiers.
La pluviométrie montre une diminution de 30% (-450 mm) depuis 1960, plus forte qu’ailleurs à Madagascar, mais reste élevée (1100-1300 mm).
Cela explique la baisse des ressources hydriques hivernales qui affecte les irrigations de contresaison (pommes de terre, maraichage) et retarde la préparation des rizières. Les analyses indiquent une dégradation des conditions hydriques au
début de la saison des pluies, en accord avec les difficultés rapportées d’installation des cultures pluviales (maïs, pomme de terre, riz,
etc.). Contrairement aux ressentis il n’y a pas de modification concernant les grosses pluies ou les pauses.Les acteurs se plaignent d’une augmentation des problèmes phytosanitaires, dont la chenille légionnaire (Spodoptera frugiperda) sur maïs, le
flétrissement bactérien (Ralstonia solanearum) et le mildiou (Phytophtora infestans) sur la pomme de terre, et les « fangalabola » (Deborea malagassa) sur les pommiers, problèmes qui ne pourront qu’être accentués par l’intensification et les évolutions climatiques. Ils rapportent aussi une baisse de la fertilité des sols, en lien avec
l’exploitation de plus en plus intensive et continue (monoculture de maïs) et les faibles apports de matière organique. L’utilisation de variétés adaptées devraient permettre de répondre à de nombreux problèmes (augmentation des températures, petits aléas
hydriques, certaines maladies), et des efforts de reboisement et d’aménagement des bassins versants (haies vives, embocagements, canaux
d’infiltration) atténueront la diminution des ressources hivernales.
La baisse de la fertilité des sols impose de se tourner vers des pratiques agroécologiques avec apport dans les sols de plus de matière organique, qui seules permettront des productions durables et une meilleure résistance aux aléas hydriques et aux bioagresseurs. Parmi les pratiques à recommander on peut citer les rotations et
associations céréales-légumineuse, déjà connues mais que l’on peut améliorer, l’intégration agriculture-élevage (production fourragère par Pennisetum purpureum et Brachiaria, fumier amélioré), les composts, les plantes répulsives
(desmodium, mucuna, crotalaire), systèmes pushpull (desmodium-pennisetum) et biopesticides naturels (« adigasy ») à base de nombreuses plantes, les haies vives et embocagements multi-spécifiques, les canaux d’infiltration et les reboisements.
L’agriculture des Hautes Terres centrale de Madagascar
est confrontée à d’importantes contraintes biophysique,
technique, social et économique. Le niveau de vie
des agriculteurs reste faible, la sécurité alimentaire
et nutritionnelle est menacée, l’accès aux marchés
agricoles et aux intrants (même organiques) est
variable et insuffisant. La démographie tend à réduire
les facteurs de production des exploitations agricoles
et le changement climatique renforce les difficultés.
Ces dernières années, les travaux de la recherche
ont permis de mieux décrire et comprendre le
fonctionnement et les contraintes des exploitations
agricoles et d’autres acteurs des territoires, d’étudier les
pratiques et de co-construire avec les agriculteurs de
nouvelles techniques de production plus performantes
et durables. Les résultats présentés ici sont destinés aux
décideurs avec l’objectif de fournir des éléments pour
soutenir le développement de l’agriculture des Hautes
Terres, et plus particulièrement des cultures pluviales
et de l’élevage, basée sur les principes de l’agroécologie,
pour contribuer à la croissance économique et à la
sécurité alimentaire, avec une amélioration du bienêtre des ménages agricoles et dans le respect de
l’environnement.