L’Afrique Subsaharienne connaît depuis plus de 50 ans une forte croissance de la population qui
correspond à la première étape du processus de transition démographique. Le nombre d’habitants a été
multiplié par 3,8 entre 1960 et 2010 (de 220 à 830 millions), ce qui s’est traduit par une densification
des territoires, d’importants flux migratoires et une urbanisation rapide. D’abord tirée par la croissance
des capitales, l’urbanisation est aujourd’hui un processus bien plus diffus qui concerne les villes
secondaires, les petites villes et les bourgs ruraux. La croissance démographique devrait se poursuivre
et les projections des Nations Unies prévoient près de 2 milliards d’habitants en 2050.
Ces perspectives d’évolutions et les effets potentiels qu’elles induisent signifient un défi particulier en
termes de création d’emplois (les cohortes d’actifs entrants aujourd’hui sont estimées à plus de 400 000
à Madagascar), mais aussi de réalisation des infrastructures et d’évolution des conditions de vie et de
développement dans les territoires ruraux. Ces défis sont importants à Madagascar où la résilience de la
population est désormais confrontée au choc démographique avec des conséquences en termes
sanitaires et alimentaires (Châtaigner, 2014). Le levier des politiques démographiques est indéniable, et
démonstration a été faite de l’impact d’une baisse de la natalité sur l’ampleur des défis économiques.
Ces enjeux démographiques, combinés à des injonctions de politiques macroéconomiques changeantes
et dictées par les crises et rebonds internationaux1, sont à examiner via la diversification des économies
rurales et des activités des ménages ruraux, qui sont toujours fortement impliqués dans les activités
agricoles mais aussi dans de nombreuses autres occupations rurales et même urbaines, par le biais de la
pluriactivité des familles, des migrations de courte durée ou circulaires, notamment vers les villes les
plus proches. La pluriactivité agricole et non agricole est généralisée (Gondard-Delcroix, 2009 ;
Ramboarison et al, 2009, Andrianirina, 2013), et le développement local, dans la région de
Vakinankaratra comme ailleurs, doit en tenir compte, en complémentarité des orientations de
développement basées sur des spécialisations régionales et sous régionales, pour relever l’immense défi
de l’emploi.
Les découpages administratifs entre le rural et l’urbain quelquefois changeants2, mais aussi, et surtout,
la réalité concrète du fonctionnement des territoires, conduisent à un brouillage de ces catégories
(Losch et al 2013). Ainsi, l’agriculture est un des moyens d’existence d’une part conséquente de la
population classée comme urbaine : à Madagascar en 2010, près de 39% des ménages classés urbains
avait l’agriculture en activité principale et près de 52% des ménages urbains avaient pratiqué au moins
une activité agricole au cours des 12 mois précédents (INSTAT, 211). Alors que nombre de ruraux
vendent et achètent de plus en plus sur les marchés des villes secondaires en croissance, et Antsirabe
n’échappe pas, comme nous le verrons, à cette dynamique.
La gouvernance locale des territoires est partout en Afrique, y compris à Madagascar, marquée par un
mouvement de décentralisation et une volonté affichée d’un transfert de compétences vers les
collectivités locales. Cependant, l’effectivité de ces transferts dépend largement des moyens à la
disposition des collectivités (la Région de Vakinankaratra et les Communes). Les ressources dont
disposent les collectivités sont faibles : les transferts de l’Etat central sont limités et la fiscalité locale
peu développée. Ainsi, à Madagascar, la décentralisation administrative et budgétaire reste encore
embryonnaire avec moins de 5% des dépenses publiques totales qui sont affectées aux entités politiques
décentralisées (Tuinenburg et al, 2014).