Dans les contextes actuels de changement climatique et de désertification des terres, il convient, pour obtenir un rendement de production optimal, de considérer à la fois la fertilité du sol et la qualité de l’environnement, en adoptant des techniques culturales adéquates (St. Clair & Lynch, 2010). En effet, dans les années à venir, la production agricole devra à la fois répondre aux besoins continuellement croissants de la population mondiale et préserver l’environnement au même titre que les ressources naturelles (FAO, 2009). Sachant que dans plusieurs pays, l’extension des surfaces cultivables est quasiment impossible, la sécurité alimentaire devrait être basée principalement sur l’augmentation du rendement de production (Kouadio et al., 2011). Or, d’une part, la fertilisation et le potentiel de la plante sont les deux principaux facteurs qui influencent le fonctionnement du sol et le rendement de production végétale (Dikinya & Mufwanzala, 2010 ; Baohanta et al., 2012), et d’autre part, les plantes pour leur croissance et pour assurer une meilleure production ont des besoins nutritionnels basiques en azote, en phosphore et en potassium ainsi qu’en d’autres éléments secondaires tels que le calcium, le soufre, le magnésium, le fer, le manganèse et le cuivre (Tyler & Olsson, 2001 ; Graham & Stangoulis, 2003 ; Morgan & Connolly, 2013). Certains de ces éléments sont naturellement présents dans le sol mais leur teneur ainsi que leur disponibilité varient considérablement d’un type de sol à un autre (Marschner et al., 2003 ; Jones et al., 2004). De ce fait, trouver l’équilibre entre les nutriments absorbés par la plante et le stock dans le sol s’avère être un mécanisme complexe. Par ailleurs, les agriculteurs, notamment ceux dans les pays en voie de développement, ne possèdent pas les connaissances nécessaires en matière de propriétés du sol que ce soit du point de vue biologique que physico-chimique. Ils essayent de pallier le problème en augmentant la teneur en fertilisant à apporter au sol, principalement en fertilisants chimiques, pour augmenter le rendement de production. Les résultats obtenus par le FAO en 2003 confirment cette constatation avec une augmentation de 6,2 kg/ha à 118,7 kg/ha entre 1961 et 2000 alors que pour les pays développés, cette augmentation a été seulement de l’ordre de 40,4 kg/ha à 80,5 kg/ha seulement. Malheureusement, ses actions n’apportent pas souvent les résultats escomptés mais entrainent d’autres situations souvent catastrophiques au niveau des propriétés physico-chimiques ainsi que sur le fonctionnement de la faune ou de la flore dans le sol (Siavoshi et al., 2011). Le manque de connaissances sur les besoins réels du sol en matière de fertilisation conduit souvent à des sur-fertilisations ou sous fertilisations à l’origine de la baisse du rendement de production. Or, l’application des fertilisants chimiques sur le long terme affecte en même temps les propriétés physico-chimiques et microbiologiques du sol (Acton & Gregorich, 1995 Zhonga & Cai, 2007 ; Stark et al., 2007 ; Savci, 2012). Cette deuxième entité est souvent négligée dans les pratiques de fertilisation alors qu’elle garantit non seulement le maintien durable de la fertilité du sol mais aussi une meilleure productivité (Magdoff & Weil, 2004). Une modification au niveau de la diversité et de la densité des microorganismes du sol reflète un changement profond en matière de fertilité du sol (Patra et al., 2008 ; Islam et al., 2009). Parmi les indicateurs microbiologiques les plus sensibles à la variation de la disponibilité en nutriments dans le sol, la communauté de champignons mycorhiziens et les bactéries fixatrices d’azote sont les plus étudiés (Allen, 1992 ; Garbaye, 1994 ; Smith & Read, 1997 ; Duponnois & Plenchette, 2003 ; Ramanankierana et al., 2006 ; Smith & Read, 2008 ; Sanon, 2009). En effet, ce sont deux composantes qui sont fortement impliquées dans le cycle biogéochimique et l’amélioration de la croissance des plantes (Duponnois et al., 2005 ; 2007 ; Faye et al., 2009). D’où l’importance de trouver le type de fertilisation adéquate ainsi que la variété intéressante pour garantir une productivité optimale, respectueuse de la fertilité du sol et le fonctionnement de ces deux types de communautés microbiennes. Généralement, divers types d’amendements organiques, minéraux ou encore mixtes ainsi que divers systèmes culturaux sont pratiqués sans considération préalable des composantes biologiques du sol. À l’échelle mondiale, le haricot vert, avec ses multiples variétés, figure parmi les légumes les plus consommés à cause de sa faible teneur en calories et sa richesse en d’autres substances nutritives (Meiners et al., 1976; Messina, 1999 ; Díaz-Batalla et al., 2006 ; Mario Paredes et al., 2009). En 2006, la totalité des demandes en importation de haricot se sont élevées en 277 000 tonnes dont la moitié provient des pays Africains. Les principaux pays producteurs par ordre d’importance sont la Chine, l’Indonésie, la Turquie, l’Inde, l’Égypte, l’Espagne, l’Italie, le Maroc, Belgique, les États-Unis, la Thaïlande et le Pays-Bas tandis que les principaux exportateurs sont le Maroc, le Kenya et l'Égypte, suivis par le Sénégal, l'Éthiopie, la Zambie et le Burkina Faso (Eurostat, 2004 ; FAO, 2006 ; Paqui, 2007). Pour le cas de Madagascar, non seulement la qualité des produits ne satisfait pas les normes préétablies dans le marché international mais la production ne peut pas répondre à la demande des pays importateurs. Ces problèmes sont étroitement liés à la fertilité du sol ainsi qu’à la lacune de connaissances sur l’écologie et les besoins en éléments nutritifs du haricot (SIC/DSEC FOFIFA, 2013). Or, les grands exportateurs comme le Kenya et la Chine ont depuis fort longtemps priorisé ces trois facteurs pour améliorer leur productivité. Des nombreuses recherches ont démontré que le développement et la productivité ainsi que la qualité des gousses des haricots sont fortement dépendants des symbioses que la plante établisse avec deux groupes de microorganismes bénéfiques du sol dont les bactéries fixatrices d’azote et les champignons endomycorhiziens à vésicules et à arbuscules (Bhattarai et al., 2011). De ce fait, en choisissant comme site d’étude des parcelles multilocales de production de haricot de la société Lecofruit Madagascar, l’hypothèse sur laquelle repose ce projet de recherche stipulait que "les différentes techniques de fertilisation du sol ainsi que la variété de haricot cultivée affecteraient d’une part la dynamique des communautés bactériennes fixatrices d’azote et de champignons mycorhiziens, et d’autre part, la qualité physico-chimique des sols de culture et par la même occasion le rendement de production". L’objectif principal a été de décrire l’évolution des communautés de bactéries fixatrices d’azote et de champignons endomycorhiziens à vésicules et à arbuscules ainsi que la dynamique des deux nutriments majeurs (azote et phosphore) des sols sous les différentes techniques de fertilisation appliquées et la variété de haricot utilisée. Les résultats obtenus permettront de proposer une ou des techniques de fertilisation qui favoriseront ces formes d’associations symbiotiques au bénéfice de la plante, de la fertilité du sol et du rendement. De ce fait, les objectifs spécifiques seront donc de :i) évaluer le développement du haricot vert, Phaseolus vulgaris et le rendement de production par type de fertilisant adopté et de variété cultivée, ii) décrire la dynamique des communautés de bactéries symbiotiques fixatrices d’azote et de champignons mycorhiziens à vésicules et à arbuscules et iii) mesurer la dynamique des deux éléments nutritifs majeurs (azote et phosphore) pour les plantes.