Introduction: L’apparition des herbicides dans les années 50 a servi de levier pour la mise en place de nouvelles technologies. Cette nouvelle possibilité de lutte contre les adventices sans intervention mécanique, doublée de la mise au point de semoirs adaptés aux sols non ameublis, ont rendu le travail du sol superflu. De nouvelles techniques, sans travail du sol mais mécanisées, ont commencé à être développées dans les années 60, dans la région du Corn Belt, aux Etats-Unis, pour lutter contre une importante érosion éolienne. Dans un deuxième temps, ces techniques se sont développées en conditions subtropicales au sud du Brésil et en Argentine, dans les années 70 (AFD & Raunet, 2006), pour lutter contre l’érosion hydrique, puis dans les Cerrados brésiliens en conditions chaudes et humides. Dans ce contexte de climat tropical, les techniques de non-travail avaient comme objectif supplémentaire de lutter contre la minéralisation de la matière organique, fortement accélérée avec le labour, et de maintenir ainsi le capital matière organique des sols. Le concept de semis direct avec couverture végétale (SCV) naît alors, rendant compte, à côté de l’effet non-travail, de l’importance primordiale de la couverture végétale, souvent renforcée par des plantes de couverture, et des diverses fonctions écologiques qu’elle peut remplir (protection des sols, lutte contre les adventices, activité biologique dans les sols, recyclage des éléments minéraux, lutte contre certaines pestes et ravageurs…). Ces pays, aux conditions climatiques différentes possèdent néanmoins une caractéristique commune : leurs grandes exploitations modernes et mécanisées. C’est principalement dans ce type d’exploitation que les techniques SCV se sont développées. A Madagascar, les systèmes SCV n’ont été abordés qu’à partir de 1994 en situation contrôlée, puis ont connu une faible diffusion en milieu paysan à partir de 1998. Le contexte d’agriculture familiale à faible niveau de mécanisation et à faible capacité d’investissement pose des difficultés supplémentaires à l’introduction des techniques SCV. Les conditions agro-écologiques du pays sont également très diversifiées, ce qui nécessite des itinéraires techniques variés et adaptés à chaque cas. La diffusion des systèmes SCV est organisée par régions représentatives de différents contextes agro-écologiques, pour cibler sur des systèmes adaptés à chacune de ces conditions. Cette étude se situe dans le Moyen-Ouest malgache, au climat tropical de moyenne altitude (900-1000 m) à longue saison sèche marquée. Dans un contexte de front pionnier en phase de stabilisation, la colonisation des terres de cette région remonte aux années 1930, mais la plupart des terres ne sont cultivées que depuis une vingtaine d’années. Les sols y sont encore relativement fertiles, mais l’agriculture pratiquée, mise en place dans un contexte d’absence de pression foncière, n’est pas durable. La pratique du labour, favorisant l’érosion et la minéralisation rapide, en plus du pompage dans le sol des éléments minéraux, sans apport de fumure de fond pour équilibrer détériorent les sols du Moyen-Ouest. Cette agriculture minière représente aujourd’hui un danger pour l’avenir de la région. Les sols des tanety (collines) s’appauvrissent, la pression foncière augmente, les agriculteurs réduisent les jachères, les rendements diminuent, et des fléaux tels que Striga asiatica, plante parasite, se développent, empêchant les cultures de céréales. Dans cette région, aux bas-fonds nombreux mais étroits, les surfaces en rizières, irriguées et à mauvaise maîtrise de l’eau, sont insuffisantes pour assurer les besoins en riz des paysans. Les cultures pluviales de riz, maïs, légumineuses à graines, et manioc sont ainsi indispensables pour assurer la sécurité alimentaire des ménages.